Slawomir Milewski est un réalisateur polonais à qui l'on doit entre autres The Ecstasy of St Agnes et Poor People Must Die. Ses films ont été récompensés lors de plusieurs festivals du film prestigieux, à New York, en France ou à Chypre, et ont été programmés pour la télévision française. Prestige International l’a rencontré afin de connaître son opinion sur le public français, la réalisation et plus encore.
Quel est le lien, si tant est qu’il y en est un, entre un bon photographe et un réalisateur ?
La photographie et la réalisation de films peuvent sembler similaires puisque toutes deux s'organisent autour de sujets "réels". Cependant, leurs répercussions au niveau sensoriel sont tout à fait différentes. Roland Barthes disait qu'il était impossible de transformer une photographie et que cette dernière ne laissait pas de place à l'évasion, comme les ses interprétations étaient figées. Avec les films, c’est tout le contraire. Ils permettent aux spectateurs de rêver et c’est là l’un des objectifs que je me suis fixé.
Comment décririez-vous la narration dans vos films ?
On m'a un jour dit que mon travail ressemblait à une toile vierge sur laquelle vous pouviez dessiner votre propre expérience de vie... Mon travail se concentre clairement sur la sémiotique visuelle en tant que facteur de narration. Ce qui ne veut pas, pour autant, dire que mes films sont symboliques. J'envisage ma narration comme une déconstruction bien que ce ne soit ni une méthode ni une règle.
Quelles sont les idées ou la philosophie que vous souhaitez transmettre à travers vos films ?
J’ai commencé à lire des ouvrages philosophiques à 15 ans. Puis à 17 ans, j’ai étudié Nietzsche et peu de temps après j’ai découvert les philosophes français contemporains. Il semblerait que ce soit ce que vous découvrez entre 16 et 26 ans qui vous marquent le plus pour le reste de votre vie. Je me retrouve, depuis cette époque, dans la notion nietzschéenne d’affirmation de soi. Vous la retrouvez donc dans mon travail.
Selon vous, pourquoi votre travail plaît-il autant en France ?
Je n’en ai aucune idée ! Lorsque j’ai présenté Ecstasy of St. Agnes à différents festivals, une ancienne actrice qui connaît parfaitement le milieu du cinéma m’a dit que mes films ne feraient jamais sensation au Royaume-Uni mais qu’ils plairaient énormément en France. J’ai souvent entendu dire que mes films étaient difficiles d’accès, politiquement incorrect, libertaires ou trop intense. Eh bien j’en suis fier ! Quant aux français, je suppose qu’ils sont simplement plus ouverts d’esprit que les autres ! (rires)
La réalisation : art ou artisanat ? Tout est relatif. Cela dépend de l'approche que vous adoptez et du public auquel vous vous adressez. Qui voulez-vous satisfaire ? Vous ou quelqu’un d’autre ? Et même si vous ne travaillez que pour vous-même, la réalisation de film reste une forme d’artisanat, ce qui peut très bien s’apparenter à l’art.